C’est une bien belle histoire que je vais vous raconter là.
Vous savez le genre de moment, dans la vie, où le temps s’arrête. Où ce qui occupe votre esprit n’existe plus. Sans même se forcer, et ben, pouf, y’a plus. Et avec ça, une grande bouffée d’air pur et du silence. Une quiétude de roi…..
C’est mon histoire mais aussi celle de ceux, qui ont permis ce rêve suspendu.
A pas de loup, suivez-moi au milieu des montagnes et des forêts…
Comment on est arrivé là? Et ben parce que l’Homme a eu un cadeau de Noël et que Bibi avait décidé que cela serait un week-end en amoureux. Un moment à nous, juste avant l’entrée à l’école de Naturo. Et franchement, on a bien fait, car buller dans les arbres n’est plus vraiment d’actualité.
On a eu un pot incroyable. Pour ajouter à la magie de l’instant, il a neigé comme pas possible l’avant-veille qu’on arrive et la Chartreuse était recouverte d’un manteau de polystyrène blanc. La neige était si fraiche qu’elle se délitait en petites perles toutes légères dans les mains.
Donc, on est en Isère, et on va découvrir les Cabanes Chartreuse Insolite. Certains vont me dire : « Mais Delphine, tu as toujours déclaré que tu détestais la Montagne… » Je peux vous dire qu’à la nuit tombée, je l’ai entendu mon grondement oppressant, qui venait de plus haut. Quand on a commencé à gravir le massif (par la route, hein, évidemment…), j’étais un peu à plat ventre dans la bagnole. Cependant, je n’arrête pas de me dire qu’il faut que je cesse de prendre peur, là, où y a pas besoin. La Chartreuse, c’est pas le glacier d’Aletsch. Et finalement, une fois que j’ai passé les moments chaotiques, je trouve qu’on n’est pas si mal, en haut.
Donc, on arrive à Saint-Pierre de Chartreuse. On prend le téléphérique. Les Essarts. Nous sommes accueillis par Cécile, aux yeux clairs comme la calcite verte. On s’engage un peu sur les pistes, sur sa motoneige. Cachés dans un poumon de conifères, deux cahutes toutes de bois construites, sur pilotis, nez à la hauteur des sapins, attendent sous le poids de la neige. Pour ajouter à ce monde narniesque, le temps s’était couvert, nuages avec. Une brume dense annonçait avec mépris la fin de la journée.
Sauf que la découverte de la cabane a vite réchauffé l’atmosphère. Les heures, qui ont suivi, n’en ont été que plus magiques.
Les cabanes sont des petits nids, tout circonspects. On y accède par dessous et une fois la trappe de la terrasse fermée, vous êtes complètement chez vous. Le bois est le matériau maître. La ferme de la toiture est magnifique. On est au chaud. Il fait calme. Chaque détail n’est que douceur. Cécile et Thérence ont conçu ces mignonneries comme s’ils souhaitaient y vivre et on le ressent. Nous sommes dans une cabane grand luxe. Cécile accueille ses hôtes sans les envahir. Elle se retire rapidement après nous avoir demandé nos préférences d’heure de repas.
Si la prouesse de l’œuvre est celle de son compagnon Thérence, je ressens pour ma part la délicatesse de Cécile dans les moindres détails : un joli pliage de serviettes, une harmonie des couleurs et des textiles, la beauté minimaliste des objets, des étiquettes sur des pots, un thé des Jardins de Gaïa.
Pris d’euphorie de neige fraiche, nous décidons de profiter des 60 centimètres d’épais, dans lesquels nous pennons à avancer. Je marche et d’un coup, je m’enfonce jusqu’à l’os sans plus pouvoir sortir. Je roule, je ris comme une oursonne. Le cul dans la neige, la tête dans les étoiles. Je m’allonge sur elle et je ferme les yeux. Le froid est piquant, et mes larmes de rire brulent le coin des yeux. Alors que nous avions pénétré le bois de sapins et d’épicéas, les extrêmes lueurs du jour se sont éteintes. Les derniers skieurs se sont volatilisés. Si on se tait, le silence nous permet enfin d’entendre notre respiration. On ne peut s’empêcher d’arrêter de gigoter et d’écouter le vide.
Je ne sais expliquer comment j’arrive à entendre cette pression entre les versants des montagnes. Je ne peux même pas décrire précisément cette lourdeur sur les épaules, qui m’empêche de regarder vers les haut de la montagne. Nouée par cette crainte qu’elle ne me tombe dessus. Je vais dormir dans une clairière. Et de façon presque instinctive, je baisse le chef, et vise mes épaules. Cette position de défense que tout le monde connaît.
« Viens, on rentre, il fait nuit »
A l’intérieur de la cabane, comme dans un ventre chaud, la porte close, tout s’arrête vraiment. Plus de bruits dehors, pas de bruits dedans. Le noir de la nuit remplace la lueur blanche de la neige. Ce noir qu’on ne connaît plus en plaine, vue que la lumière humaine a bouffé celle de la Lune.
Tout est incroyablement pensé. Une place pour chaque chose et chaque chose à sa place. J’ai de la neige cristallisée dans les chaussettes. On a pris peu de choses. Pour la première fois de ma vie, mon bagage a tenu dans un sac à dos. Et c’est avec fierté que je shoote mes images pour mon billet livre sur « L’art du minimalisme ».
Le hygge danois aussi. A l’intérieur du ventre, je réchauffe de l’eau pour laisser infuser une verveine des Chartreux. Un bon goût d’herbes sèches s’exhale. Et je dois le dire, j’oublie le contexte. La cabane possède des fenêtres basses. L’extérieur ne vient pas envahir l’intérieur, le toit faisant couverture. Je n’arrête pas de toucher les parois de la cabane. Il me semble qu’elles sont plus fines qu’une mur de brique et pourtant on ne sent pas l’air glacial extérieur. Pas une fuite de froid. Cette construction est excellemment bien faite. Je suis vraiment époustouflée par ce travail. Je me complets dans la chaleur du bois, et sa douce lumière.
Une fois les photos finies, alors que l’Homme prend sa douche, dans la petite salle d’eau parfaitement conçue, je ne peux m’empêcher de rouvrir la porte. On est toujours un peu maso, non? J’ai envie de me confronter à mes peurs d’enfants. Et je l’entends. Je suis assez sensible aux phénomènes énergétiques. Je sais que la pression atmosphérique en montagne est plus forte, que la charge radioactive aussi, et que ce calcaire qui constitue la Chartreuse est rempli de minéraux et de cristaux. Est-ce cela que je ressens si fort et qui vient ébranler mon énergie intérieure? Je me sens petite. Et ce silence toujours aussi dense.
Tel un petit lutin, je me précipite dans ma tanière du jour, refermant la porte face à ma peur de l’immense.
C’est ainsi que je vais passer la nuit. Cette cabane a une allure de cocon. Elle sent bon la sécurité. Je dors parfaitement bien, sans avoir peur, contre l’Homme. Comme une bien heureuse chanceuse que j’ai de vivre un beau moment.
Le lendemain, nous décidons de redescendre à la station à pied. Cécile nous propose de nous ramener si on se sent fatigués, ou de téléphoner si on rencontre un problème. J’ai envie de lui poser des questions car je sais que je vais forcément écrire un billet sur ce lieu magique, mais je n’ose pas la déranger.
Nous passons 4 heures à descendre tranquillement pas un chemin zigzaguant au travers les pistes de ski, puis se terminant sur un sentier pédestre. Tout est blanc, lourdement enneigé, scintillant au soleil.
Les gros skieurs, les grands montagnards se ficheraient certainement de moi, avec mes craintes et ma redécouverte de la neige. On passe un moment de bonheur exquis. Peu de monde sur les pistes, dans un paysage vierge, aux reflets de bleu du ciel sur la neige, un soleil vainqueur, et l’envie que ça dure des lustres.
A mon retour, j’ai eu envie de poser mes questions aux concepteurs de ces belles cabanes. Je leur ai donc envoyé un mail et ils m’ont gentiment répondu.
Quel est votre parcours à chacun? Qu’avez-vous fait avant de créer ce joli concept ?
Thérence est élagueur et fait de la rénovation et des travaux sur cordes jusqu’en 2012 lorsqu’il entame en parallèle un Brevet d’État de monteur de ski après avoir été pisteur plusieurs années sur la station de St Pierre de Chartreuse. Passionné par la nature et le bois, il attaque un CAP Charpente l’année dernière et lance en même temps son rêve d’enfant, créer des cabanes. Petit, il en faisait de nombreuses dans les forêts du balcon sud de la Chartreuse. Thérence est né à Sarcenas.
Cécile travaille dans le domaine du Tourisme, de l’Enfance et de la Jeunesse, dans le but d’améliorer la qualité de vie de chacun. Cécile est une personne investie dans la vie associative et le tissu social de son village. (Et on sent bien qu’elle est très aimée, au regard des réactions du personnel des remontées mécaniques lorsque nous avons prononcé son prénom. J’évoquai sa délicatesse et ce n’est pas une vue de l’esprit.)
Pourquoi avez-vous choisi la Chartreuse pour installer vos cabanes ?
Nous sommes tous les deux natifs de la Chartreuse et nous avons envie de promouvoir le massif et ses richesses par le biais d’un projet qui nous tiens à cœur : les cabanes perchées.
Comment avez-vous imaginé et construit ce joli concept des cabanes en pleine Nature ?
En nous inspirant de ce qui existe et en composant en fonction de nos goûts, en choisissant des matériaux de Chartreuse et des savoir-faire locaux. Nous avons fait appel à différents corps de métiers (charpentier, menuisier, forgeron, potier…) du massif pour réaliser ces deux cabanes et nous avons mené de A à Z ce projet en tant que maître d’œuvre et artisans car Thérence s’est occupé des fondations et de tous les intérieurs. Elles sont le reflet de ce que nous aurions aimé faire chez nous.
J’ai remarqué plein de détails relatifs à la proximité de la Nature, et à l’Écologie. Quelle sont vos relations avec ces thématiques ?
Nous ne pouvons vivre sans elle et sans s’en préoccuper et la respecter. Nous sortons tous les deux d’un cursus scolaire agricole forestier. Nous l’habitons et nous l’aimons.
L’investissement personnel, la volonté de faire plaisir aux autres, le locavorisme, l’amour donné aux autres. Je sais maintenant pourquoi je me suis sentie si bien dans ma cabane.
A présent, je vais aborder un sujet, qui intéressera mes amis végéta*iens. Lors de votre réservation, le petit déjeuner sera compris. Cécile et Thérence propose aussi des panier repas. Tout est copieux, bon et extrêmement frais. Cécile cuisine maison. Sa délicatesse se retrouve dans la présentation des paniers et sa cuisine. Mon omnivore de chéri a été ravie par son panier « Raclette », mais il y en a d’autres.
Pour ma part, j’ai toutefois demandé s’il serait possible de « végétarianniser » mon panier. Oui, végétarianniser parce que je sais que cela peut être compliqué quand on ne sait pas. Ma demande a été acceptée sans discussion. J’ai opté pour la panier « Au coin du feu ». Il était gargantuesque. J’ai eu droit à une « double » soupe succulente aux légumes de saison, une bonne salade croquante avec une vinaigrette aux graines de moutarde. Le pain était à tomber. Je n’ai pas déguster le fromage que j’ai donné à l’Homme, ravi. Cécile m’avait concocté une tarte salée aux légumes. Les desserts étaient eux aussi confectionnés maison.
Lorsque j’ai adressé mes questions à mes hôtes, je leur ai demandé s’ils auraient accéder à une demande de végétalisation complète de mon panier. Et Cécile a répondu un beau OUI bien net. Donc, Amis végéta*iens, vous êtes donc les bienvenus en ces lieux.
Quant aux petits déjeuners du matin, ils sont pantagruéliques. Il y avait largement de quoi sustenter un omni et une veggie. 😉
Ce moment a été si spécial, que ………………….. j’ai envie d’y retourner cet été.
Merci à Cécile et Thérence pour ce lieu magnifique.
N’hésitez pas à vous offrir ce moment. Vous verrez, vous passerez un moment absolument formidable.
Bien à vous.
Nini